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plus d’adhérents et parmi les naturalistes les plus distingués[1]. Et plus récemment, M. Cuénot[2], résumant l’évolution des théories transformistes, pouvait inscrire en première ligne « l’abandon de l’hérédité des caractères acquis ».

II

Est-ce à dire que nous ayons le droit, dès à présent, de tenir pour définitivement démontrée la non-hérédité des qualités acquises quelles qu’elles soient, et ainsi, sans plus ample débat, de renvoyer à une science mieux informée les apologistes du régime des castes ?

Il faut croire que la question est particulièrement complexe, car l’opinion des savants arrive difficilement, en cette matière, à se fixer : après nous avoir éloignés des idées de Lamarck, voici, dirait-on, qu’elle nous en rapproche.

Et d’abord, les conceptions théoriques en vertu desquelles Weismann déclarait inconcevable l’opération de l’hérédité, telle que la supposait Lamarck, sont elles-mêmes bien près d’être abandonnées. La plupart de ceux qui admettent les critiques de Weismann, à l’égard d’observations trop aisément accueillies, repoussent ses propres explications. Le même auteur qui nous laisse entrevoir la faillite de l’hypothèse lamarckienne ne nous cache pas celle de l’hypothèse weismannienne : « Cette théorie de l’hérédité, malgré son ingéniosité, s’est écroulée sous le poids de sa complication et de son invraisemblance[3]. »

Au surplus, que la transmission des qualités acquises paraisse intelligible ou non en vertu d’une théorie précon-

  1. Année biologique, I, p. 963.
  2. Art. cité, p. 265.
  3. Cuénot, art. cité. Cf. Haycraft, op. cit. Appendice.