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sée égalitaire », on le devine. L’égalitarisme ne tend-il pas à tout niveler et à tout mêler, à abaisser toutes les barrières qui maintenaient les races isolées, à balayer tout ce qui survit des antiques hiérarchies ? Il est donc un vœu contre nature, une imagination de raisonneurs métis, un rêve ou un calcul de brachycéphales[1]. Il méconnaît les conditions élémentaires du progrès des espèces. En deux mots, il nie l’hérédité.

Tel est le thème que s’empresseront de commenter les polémistes hostiles à l’esprit de la Révolution française. Ils l’accuseront de laisser perdre, par ses innovations étourdies, le meilleur de « cette énergie accumulée par nos ancêtres, par ces morts qui parlent en nous ». Si la science prouve, dit M. Bourget[2], qu’ « un des facteurs les plus puissants de la personnalité humaine est la race… rien de plus contraire aux principes scientifiques que cette formule : les Droits de l’homme, qui pose, comme donnée première du problème gouvernemental l’homme en soi, la plus vide, la plus irréelle des abstractions ». Quelle folie de vouloir ouvrir à tout venant l’accès de toutes les fonctions sociales quand il est constaté que « des individus déjà différenciés par l’exercice d’un métier produisent, en général et en moyenne, des individus différenciés et, pour ainsi dire, polarisés en un même sens[3] ». Il y a dans le principe de transmission héréditaire, dit M. de Lur-Saluces[4], « un élément d’accélération méthodique qui permet aux forces humaines de produire sans déperdition leurs plus grands effets » ; mais nos démocrates font fi de ces bénéfices, oublieux qu’ils sont, par principe, de « tout ce qui se transmet avec le sang ».

  1. Gobineau, Essai sur l’inégalité des races humaines, I, p. 35. — Ammon, Natürliche Auslese, p. 185. — Lapouge, Sélections sociales, p. 239, 259.
  2. Enquête sur la monarchie, 1er fasc., p. 38.
  3. Ch. Maurras, Enquête, 2e fasc., p. 85.
  4. Ibid., 1er fasc., p. 34.