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des mesures précises, les types anthropologiquement différents. C’est ainsi qu’elle ne parlera plus de race anglosaxonne, de race latine ou de race française, mais de race brachycéphale ou dolichocéphale. Elle montrera qu’à ces caractères proprement biologiques, des caractères psychologiques correspondent. Elle discernera méthodiquement les éléments « eugéniques » des éléments inférieurs. Et dès lors, par la façon dont ces éléments y sont répartis, elle pourra expliquer scientifiquement la grandeur ou la décadence des nations.

Toute organisation sociale est en effet une superposition de races ; et du mode de superposition des races dépend la valeur de telle ou telle société. Les représentants des races supérieures, les « eugéniques » sont-ils en bon nombre et surtout en bonne place ? Les trouve-t-on nantis des fonctions directrices et garantis contre les mésalliances corruptrices ? Alors la société prospère. Sinon c’est le déclin fatal. L’histoire explique donc vainement la destinée des peuples par de vagues raisons économiques ou morales. Elles ne sauraient être que superficielles. C’est à un procès d’évolution biologique qu’il faut ramener, suivant M. Vacher de Lapouge[1], l’évolution historique des civilisations. Toutes les luttes de classes, dit un autre anthropologiste[2], ne sont en leur fond que des luttes de races. Et toutes les questions sociales seraient vite résolues si l’on voulait seulement « mettre chaque race à sa place[3] ». Telle nous apparaît dans ses grandes lignes, à travers les recherches ou les manifestes des Gobineau, des Otto Seeck et des Reibmayr, des Lapouge et des Ammon, la doctrine de l’anthroposociologie.

Avec quelle sévérité une pareille doctrine jugera la « pous-

  1. Les lois fondamentales de l’anthroposociologie, dans la Revue scientif., 1897.
  2. M. Collignon.
  3. Cité par Manouvrier, L’indice céphalique, p. 253.