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CONCLUSION


Si les vivants se perfectionnent, c’est que les faibles disparaissent devant les forts, — c’est que les qualités des individus s’incrustent dans leur race, — c’est que les éléments des organismes se spécialisent sans réserve et sans retour. En trois mots, la différenciation, l’hérédité, la concurrence, voilà les inflexibles gardiennes du progrès universel. Or, n’est-ce pas une conséquence fatale de la logique égalitaire que la tendance à tout niveler, à tout mêler, à tout « atténuer » ? Par son horreur des castes et par son respect de la personnalité humaine, l’esprit démocratique est amené à faire fi de toutes les conditions indispensables à la santé des organismes. Ceux sur lesquels cet esprit s’est abattu, — les grands organismes que sont nos sociétés modernes, — seront donc bientôt paralysés. Pour avoir résisté à la nature, les nations qui auront cédé à la démocratie seront rayées de l’histoire.

Telle est la thèse en trois arguments à laquelle nous nous sommes heurtés, à l’entrée de nos recherches. Nous avons suivi docilement, sur tous les terrains où il leur a plu de nous appeler, tous ceux qui pensent, au nom de la sociologie naturaliste, pouvoir défendre cette thèse. Nous nous sommes rencontrés tour à tour avec l’anthroposociologie, avec la théorie organique, avec le darwinisme social. De toutes ces