Page:Bouglé - La Démocratie devant la science, 1904.djvu/287

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de ces deux tendances apparaissait la figure du surhomme, où l’on retrouve à la fois de l’ambitieux et de l’artiste, du dominateur et de l’esthète — poète en même temps qu’homme de proie, et désireux de s’élever au-dessus de la masse pour s’élever au-dessus de lui-même. Contre ces déviations, le solidarisme nous met en garde. Il nous ramène sur la terre et nous rattache étroitement à nos semblables. Il nous rappelle que nous ne sommes nés ni pour nous fuir, ni pour nous écraser les uns les autres ; et que nous ne pouvons développer nos personnalités que par une incessante coopération.

En un mot le solidarisme nous aide à opposer, aux formes aristocratiques, desséchantes et dissolvantes, de l’individualisme, un individualisme démocratique, principe fécond d’union et d’action sociales, dont la devise ne serait plus « chacun chez soi », ou « chacun pour soi » mais « chacun pour tous, tous pour chacun » — et dont l’avènement marquerait aussi la victoire définitive de la nature proprement humaine sur la nature animale.