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De même, tout un ensemble d’habitudes et d’institutions déterminées est nécessaire pour que s’installe dans une société un sectionnement complexe de la production. Il y faut, par-dessus les cercles fermés des premières unités économiques, une expansion du commerce proprement dit qui est bien loin d’être un fait aussi universel qu’on a paru le croire.

En un mot, ces diverses formes de la division du travail correspondent à des états différents de la technique humaine, non seulement industrielle mais commerciale. Désormais, si nous voulons répondre méthodiquement à cette question : « Quelle place occupe et quel rôle joue la division du travail dans telle ou telle société ? » nous devrons montrer que tel ou tel de ces modes y prédomine, et ce sont ces distinctions, — que l’analogie des formes organiques ne pouvait nous suggérer, que seule l’analyse directe des réalités historiques nous a dictées, — qui devront commander nos recherches.

II

Mais il faut approfondir ces distinctions mêmes. Nous ne serions pas encore suffisamment, renseignés sur l’état et les effets de la division du travail dans une société, si nous savions seulement en quelle proportion s’y rencontrent la spécialisation des métiers, la décomposition des besognes, le sectionnement de la production. Les sociétés humaines ne se distinguent pas seulement des organismes par les inventions qui s’y propagent, par les procédés qu’elles adoptent pour accommoder la nature à leurs besoins, par les habitudes que leurs membres contractent en conséquence, par les rapports de fait qui s’y établissent entre les hommes et les choses, les producteurs et les instruments ; elles se distinguent encore et surtout par les institutions qu’elles consacrent, par