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qu’elle distingue. Il n’est pas vrai, par exemple, que la cellule consacrée à la digestion devienne complètement incapable de respirer ; l’élément spécialisé conserve à quelque degré les facultés naguère cumulées.

« Le mouvement, dit M. Verworn[1], par une spécialisation de la propriété de contractilité, devient fonction particulière des cellules musculaires chez les animaux supérieurs, la faculté de percevoir les excitations acquiert un haut développement dans les organes des sens, le phénomène de sécrétion atteint sa plus haute expression dans la fonction des cellules glandulaires. — Malgré cela chaque espèce de cellule conserve tous les phénomènes vitaux élémentaires, et sa spécialisation provient seulement de ce qu’un de ces phénomènes se trouve porté à un degré de développement particulièrement élevé. » Ainsi, dans l’organisme différencié, les cellules se distinguent surtout par l’intensité que prend telle ou telle propriété dans leurs divers groupes ; mais ces groupes divers continuent de posséder à quelque degré les mêmes propriétés.

Ce que nous disons des cellules, a fortiori le dirions-nous des organes. On sait qu’ils sont formés par des combinaisons de tissus — épithéliaux, conjonctifs, musculaires, nerveux — qui se retrouvent dans tous les appareils de l’organisme, dans l’estomac comme dans le poumon. Même dans les muscles et les nerfs, qui pourtant sont essentiellement formés par un seul et même élément, on reconnaît plusieurs autres groupes élémentaires, et notamment le tissu conjonctif ; les organes différenciés continuent donc de se ressembler par certains côtés, comme se ressemblent les cellules mêmes qui les forment.

Mais ce qu’il importe surtout de noter, c’est que ces ressemblances paraissent nécessaires au fonctionnement même

  1. Physiol. gén., p. 641.