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CHAPITRE III

LA VIE ÉCONOMIQUE — LA CONSOMMATION


Quelle sorte d’action peut exercer, sur la vie économique, le régime des castes ? Quelles formes propres tendent à revêtir la production, la circulation ou la consommation là où les hommes se trouvent répartis et comme parqués en petits groupes à la fois héréditairement spécialisés, mutuellement opposés, et hiérarchiquement superposés ? Si l’on veut essayer de répondre par l’observation à la question ainsi posée, il semble qu’il n’y ait qu’à interroger la civilisation hindoue ; c’est chez elle surtout que nous avons rencontré, maintenues ou développées pendant des siècles, cette différenciation héréditaire, cette répulsion réciproque et cette hiérarchie consacrée qui sont caractéristiques du régime des castes.

De fait, Sumner Maine [1] nous avertissait dès longtemps qu’on pourrait admirer, en Inde, la domination tyrannique de toutes sortes d’influences que les économistes se plaisent le plus souvent à considérer comme des quantités négligeables, et qu’ils inscrivent au compte du « frottement ». Selon M. Ranade [2], ce qu’il y a de particulièrement instructif dans le spectacle de la vie économique en Inde, c’est qu’elle ne semble réaliser aucun des « postulats » de l’économie politique classique des Occidentaux.

Malheureusement on sait aussi avec quelle jalousie la civilisation hindoue garde les secrets de son histoire, et en

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