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Et ton père, mon fils — le brave petit homme ! —
Se fit si cajoleur et tant le supplia
Que le vieux bûcheron finit par dire : « En somme,
Je puis attendre encor… », s’en fut… et m’oublia !

Et je n’ai plus revu mon sauveur, — Dieu le garde ! —
Mais je me doutais bien qu’un jour son fils viendrait ;
Et, puisque te voici venu, je veux, ô barde !
Afin de m’acquitter, te dire mon secret :

On a, de mes rameaux émondés chaque année
Et du bois de mes fiers et nombreux rejetons,
Meublé, du sol au toit, plus d’une maisonnée
Et fait bien des berceaux pour les petits Bretons ;

Et c’est ainsi qu’un jour, au temps de ma jeunesse,
Un rustique artisan, de son humble ciseau
Fouilla, longtemps, le bois de ma branche maîtresse
Afin d’en façonner un illustre berceau…

 

Et j’ai l’immense Orgueil (j’y songe encor sans trêve
Et j’en frémis encore à l’heure du déclin)
D’avoir bercé, jadis, le formidable Rêve
Du petit gâs de Broons… qui fut le grand Guesclin ! »