Et les Bleus ébahis de voir, à la seconde,
Tant de Chefs qui s’offraient au feu de leurs flingot :
Cherchaient en vain l’épi de blé, la paille blonde,
Dans ce champ de coquelicots !
Braves gâs de Bretagne, et vous, gâs de Vendée
Qui vouliez être chefs pour braver les dangers,
J’ai pensé bien souvent à vous tous, cette année,
Et trouvé les temps bien changés !
Il est encor des preux à l’époque où nous sommes,
Certes : voyez plutôt les Anglais et les Boërs !
Voyez Cronje tenant avec deux, trois mille hommes
Contre soixante mille, huit jours ;
Et Villebois-Mareuil, ce martyr volontaire,
Moderne paladin d’un lointain Roncevaux,
Coquelicot français que la lâche Angleterre
A fauché d’un revers de faulx !
Les Boërs sont, comme vous, des bataillons informes
De rudes paysans luttant pour leurs drapeaux,
Sans fiers états-majors, sans brillants uniformes :
Vestes de bure et grands chapeaux.
S’ils n’ont pas de canons — tout comme vous, naguère —
Ils clouent sur un affût un tronc d’arbre ébranché ;
Et quiconque est visé par leur fusil de guerre
Est, d’avance, un homme touché.