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HISTOIRE D’UN MOUSSE




I


FILS DE VEUVE




Au bout de la falaise morne
Où croasse le goéland,
Face à l’immensité que borne
L’horizon, d’un long trait sanglant,

La veuve habite une chaumière
D’où, l’œil taciturne et très las,
Elle observe la Meurtrière
Qui lui prit son homme et ses gâs.

Auprès d’elle, dans la masure,
Dort sur un monceau de varec
Son Tanguy dont la chevelure
A la couleur du chanvre sec.

Celui qui dort un si bon somme
Est le dernier de ses enfants :
Il est fort comme un petit homme,
Bien qu’il n’ait pas encor dix ans ;

Et c’est pour mettre en sa jeune âme
Le durable effroi de la mer,