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SAINTS POPULAIRES.

Le nom même de remplacement de cet ancien monastère a été effacé et perdu ; on sait seulement que Nantes ou Nantel, Nantus, était situé auprès de la mer, sur la limite des diocèses de Coutances et de Bayeux. La manière dont saint Marcouf obtint la donation de ce terrain, est une des circonstances les plus curieuses de sa légende :

Saint Marcouf était né à Bayeux, vers le milieu du vie siècle, de parents riches qu’il perdit fort jeune. Après leur mort, il se retira auprès de saint Possesseur, évêque de Coutances, qui lui conféra l’ordre de la prêtrise, et l’envoya ensuite prêcher la parole évangélique, dans toute l’étendue du diocèse. Subjugués par un attrait tout céleste attaché à la personne du saint, un grand nombre de fidèles lui témoignèrent le désir de vivre entièrement sous sa direction. Ce fut alors que, pour satisfaire à leur vœu, saint Marcouf avisa, comme un lieu propice, le territoire de Nantes, faisant partie du domaine royal. Sans se préoccuper des difficultés de son entreprise, saint Marcouf se dirigea vers Paris, pour obtenir du roi Childebert le terrain qu’il avait trouvé à sa convenance. Lorsqu’il arriva au terme de son voyage, il était précisément l’heure du jour à laquelle les cloches font entendre leurs joyeuses volées, pour inviter les fidèles à la cérémonie de la messe paroissiale du dimanche. Marcouf ne négligea point cette favorable occasion ; il se rendit à la cathédrale, persuadé qu’il y trouverait le roi, et bien résolu à tout tenter pour approcher de sa personne. Cependant, notre saint se plaça d’abord dans le coin le plus retiré de l’église, pour y vaquer à ses prières, plus empressé encore qu’il était d’adorer le Très-Haut, en toute humilité, que de solliciter une puissance royale. Tandis qu’il s’abandonnait ainsi à sa ferveur intérieure, un murmure inexplicable commença à s’élever de toutes parts dans l’église. C’étaient des lamentations sourdes, des plaintes étouffées, des grincements furieux se mourant dans un cri d’angoisse, toutes sortes de soupirs et de clameurs accusant tour à tour le désespoir et la souffrance, la colère et la supplication. Le service divin est interrompu ; on s’interroge