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On la doit consulter surtout dans l’exercice
Des charges de l’État d’où dépend la justice ;
Dans ce qui, parmi nous, est de convention,
Et forme par degrés la réputation.
Mais elle est sans pouvoir pour tout ce qu’on appelle
Du nom de badinage, ou bien de bagatelle ;
Pour tout ce qu’on regarde universellement
Sur le pied de plaisir ou de délassement.
Dans un tendre commerce elle n’est plus admise,
Et même s’en piquer devient une sottise.
L’amour n’est plus qu’un jeu, qu’un simple amusement,
Où l’on est convenu de tromper finement ;
D’être dupe ou fripon, le tout sans conséquence,
Mais d’être le dernier pourtant avec décence.

Le Marquis.

Le plus beau des liens, d’où dépend notre paix,
Peut-il être avili jusques à cet excès ?
Le monde est étonnant dans sa bizarrerie.
Le joueur qui friponne est couvert d’infamie,
Et le perfide amant qui trompe et qui trahit
Devient homme à la mode, et se met en crédit.
Quel travers dans les mœurs, et quel affreux délire !
Aussi grossièrement peut-on se contredire ?

Le Baron.

C’est l’idée établie, il faut s’y conformer.

Le Marquis.

Mon âme à penser faux ne peut s’accoutumer.
Le jeu, dont j’ai parlé, commerce de caprice,
Fondé sur l’intérêt, la fraude et l’avarice,
S’est rendu par l’usage un lien révéré :