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Et se voir enlever ce trésor qu’on adore,
Par la main d’un ami qui lui-même l’ignore,
Y met encor le comble, et le rend plus affreux !
Je me plaignois tantôt de mon sort rigoureux,
Quand mes soins ne pouvoient découvrir sa demeure ;
J’aurais beaucoup mieux fait de craindre et de fuir l’heure
Où je devois apprendre un secret si cruel. [
Pour moi sa découverte est un arrêt mortel.
Je serois trop heureux d’être dans l’ignorance,
Et du baron du moins j’aurois la confidence.
Je pourrois dans son sein épancher ma douleur.
Hélas ! j’ai tout perdu jusqu’à cette douceur.
Quel état violent ! Ô ciel ! que dois-je faire ?
Dois-je fuir ou rester, m’expliquer ou me taire ?
Que dirai-je au baron ? Pourrai-je l’aborder ?
Ah ! d’avance mon cœur se sent intimider ;
Je ne pourrai jamais soutenir sa présence,
Mon trouble… Juste Dieu ! je le vois qui s’avance.

(Champagne sort.)



Scène II.

LE BARON, LE MARQUIS.
Le Baron.

J’étois impatient déjà de vous revoir.
Eh bien ! n’avez-vous rien à me faire savoir ?
Répondez-moi, marquis. Vous évitez ma vue ;
Je vois sur votre front la douleur répandue.
Qu’avez-vous ?