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comme Des Barreaux, pour supposer même qu’on pût mettre en doute l’autorité de l’Église catholique. Ce siècle-là avait deux cultes : le roi et l’Église. Tout le monde courbait la tête devant ces deux noms ; et les frondeurs étaient eux-mêmes effrayés de leur audace quand ils écrivaient contre les jésuites ou contre les nobles.

Au reste, quel que fût le motif de l’admiration de Boileau pour le roi, elle était très-sincère, et d’autant plus honorable qu’elle ne lui arrachait aucune bassesse. Il fut toute sa vie l’ami et le défenseur des solitaires de Port-Royal. Il garda avec le roi son franc parler dans une certaine mesure. Louis XIV lui montra des vers qu’il avait faits. « Rien n’arrête Votre Majesté, elle peut tout, dit-il. Elle a voulu faire de mauvais vers, elle y a réussi. » On a cru même qu’à plusieurs reprises, il parla de ce misérable Scarron, des sottes comédies du pauvre Scarron, en présence du roi et de Mme de Maintenon. Ces anecdotes, quoique appuyées sur de bons témoins, doivent paraître suspectes. Les courtisans, et il l’était, ne sont pas si oublieux. On prétend que Racine le reprenait, et que Boileau parodiant un vers latin, lui déclarait que son amour pour le roi n’irait pas jusqu’à le forcer de pardonner à l’inventeur du genre burlesque. Il est malaisé de concilier ces récits avec celui de Saint-Simon, qui attribue la mort de Racine à un oubli de ce genre, et à la disgrâce qui en résulta. On comprend mieux une distraction de Racine que de Boileau. Boileau était grave, compassé, ré-