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mais elle eut du courage, car elle ne se détourna pas une seule fois pour regarder autour d’elle, et après avoir fini son ouvrage, elle courut à la maison comme s’il y avait eu le feu derrière elle.

Le troisième jour, c’était un dimanche, la mère fit des gâteaux, et le père alla inviter monsieur le maître et quelques vieillards, ses voisins, pour l’après midi, en sorte que les gens du village se disaient : « Chez Mikscli, on va célébrer aujourd’hui les accordailles. »

Dans l’après-dinée, entrèrent dans la cour trois hommes endimanchés, dont deux avaient du romarin aux manches. Le père de Victoire les reçut sur le seuil, et les gens de service, restant debout sous l’avant-toit, disaient ; « Que Dieu vous donne beau coup de bonheur ! » « Dieu vous entende ! » répondit, au lieu du père et du fils, l’intermédiaire des fiançailles.

Le fiancé entra le dernier. Quelques voix de femmes se firent entendre en dehors : « C’est un très-joli garçon, cet Antoine ; et qui porte fièrement la tête comme le cerf ! Et quelle belle branche de romarin il a attachée à sa manche ! Où l’a-t-il donc achetée ? » — Et des voix d’hommes répondaient : « Quant à cela, il peut porter la tête bien haute, puisqu’il emmènera la plus jolie fille du village, une bonne ménagère, la meilleure danseuse, et qui, de plus, a aussi de la fortune ! »

C’est ainsi que se prononçaient plusieurs de ses parents du village, bien fâchés qu’elle eût choisi quelqu’un des environs. Pourquoi, disaient-ils, n’en a-t-elle pas pris un du même endroit ? N’y avait-il pas