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« Non ! ce n’est pas là le motif, chère mère ! Mais c’est que j’aurais aussi bien engagé ma parole à tout autre brave garçon. »

« Je t’en prie, ma fille, qu’est-ce que tu dis là ? Il s’en est présenté assez, et tu n’as jamais voulu d’aucun d’eux. »

« Mais alors le soldat, aux yeux méchants, ne me poursuivait pas encore, » dit Victoire à voix basse. « Je pense que tu ne sais pas bien ce que tu dis. Pourquoi parler d’un soldat ? Pourquoi fais-tu attention à lui ? Qu’il aille où il veut ! laisse-le. Ce n’est pas lui qui devrait te faire partir de la maison paternelle. »

« Oh ma mère ! c’est lui, lui seul qui en est la cause ! j’ai tant de chagrin, tant de peine, que je n’ai de repos nulle part ! » dit la fille en pleurant.

« Et pourquoi ne me l’as-tu pas dit plus tôt : je t’aurais conduite chez la vieille femme du forgeron, elle sait consulter dans des accidents pareils. Sois tranquille, nous irons demain chez elle, » fit la mère pour consoler sa fille.

Et le lendemain, la mère et la fille étaient en chemin.

Cette vieille prétendait toujours savoir beaucoup de choses que les autres ne connaissaient point. Faisait-on une perte ? Les vaches ne donnaient-elles pas de lait ? Quelqu’un était-il malade ? — la femme du forgeron savait le remède à tout, elle devinait tout. Victoire lui raconta en confiance tout ce qui se rapportait à elle.

« Et tu ne lui as jamais parlé, jamais dit le plus petit mot ? » demanda la vieille maréchale.