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Quelques minutes après, la ménagère rentrait, les mains toutes chargées. Une nappe blanche recouvrit aussitôt la table de chêne, pour recevoir des assiettes en porcelaine et des couteaux à manches en corne de cerf ; il y parut bientôt des fraises, une omelette, du lait, du pain, du miel, du beurre et de la bière.

La dame du logis retira le fuseau des mains de grand’mère, en lui disant : « Ne filez plus à présent, et servez-vous ! Coupez du pain et y étendez du beurre. Il est tout frais battu, et la bière n’est point baptisée. L’omelette n’est pas excellente ; je l’ai faite aujourd’hui, et seulement au petit bonheur ; mais on trouve appétissant ce sur quoi l’on ne comptait pas. Des fraises ? vous n’en mangez point ; mais les enfants les aimeront quand je les aurai arrosées d’un peu de crème. » C’est ainsi que la ménagère engageait son monde, débitant les morceaux de pain les uns après les autres, les recouvrant de beurre et y versant des filets de miel.

Tout à coup grand’mère se frappa au front, comme celle à qui revient un souvenir : « En voilà une vieille tête qui n’a pas de mémoire ! Voyez, je n’avais pas encore pensé à vous dire que nous avons causé avec madame la princesse au pavillon. »

« Je ne m’en étonne pas, car ces enfants nous étourdissent de leurs cris, » dit la femme du chasseur. Mais lui, il voulut tout de suite savoir ce que la princesse leur avait dit.

« Ne commencez pas encore, » demanda sa femme, avant que je sois revenue ! Je vais appeler les enfants pour les faire manger, et je crois qu’ils n’en seront que plus sages.