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M. Beyer était un grand, sec, qui n’était qu’os et muscles. Il avait le visage oblong et bruni par le soleil ; les yeux, grands et clairs : le nez long et un peu arqué ; les cheveux châtains, et les moustaches longues. Le chasseur de Riesenbourg était fort ; il avait les joues colorées, portait de petites moustaches et il était toujours soigneusement peigné. M. Beyer portait, partagés au-dessus du front, des cheveux qui, par derrière, lui tombaient jusque sur le collet. C’est ce que les enfants eurent tout de suite remarqué. Le chasseur de Riesenbourg avait la démarche aisée, tandis que M. Beyer semblait passer par-dessus des abîmes. Celui de Riesenbourg ne portait pas de bottes qui dépassassent la hauteur des genoux ; il avait un plus beau fusil avec une meilleure courroie et une plus belle gibecière ; son bonnet était orné déplumés de geai. L’habit de M. Beyer était assez usé ; la bandoulière de son fusil très-forte, et il portait au chapeau des plumes d’autour, de milaneau et d’aigle.

Tel fut l’aspect sous lequel se présenta M. Beyer. Mais à peine les enfants l’eurent-ils vu qu’ils l’aimèrent ; et grand’maman affirmait que les enfants et les chiens reconnaissent tout de suite qui les aime. Elle avait donc bien deviné cette fois. M. Beyer, lui aussi, aimait beaucoup les enfants ; son favori était Jean, le dissipé Jean, dont on disait que c’était un lucifer. M. Beyer disait au contraire qu’on en ferait un bon garçon, et que, s’il voulait devenir chasseur, il le prendrait volontiers chez lui.

Le chasseur de Riesenbourg qui venait toujours aussi à la Vieille-Blanchisserie, quand s’y trouvait son frère des montagnes, disait : « Oh ! quant à ça, s’il veut