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buisson en buisson, si les femmes de journée n’avaient pas laissé, de ci, de là, quelque chardon qu’il dût arracher et jeter par-dessus la haie. Tout était en mouvement dans l’attente de la grande maîtresse. Ceux qui n’avaient qu’à gagner à son arrivée s’en réjouissaient ; il s’en trouvait d’autres qui n’en étaient plus gais ! Le personnel de l’intendance courbait chaque jour la tête d’une palme de plus qu’il n’avait fait la veille ; et quand on entendit dire dans la cour : « C’est demain qu’ils arrivent ! » M. l’administrateur devint si humble, qu’il rendit le salut au maître-batteur ; chose qu’il n’avait faite de tout l’hiver, alors qu’il se trouvait être la première personne du château. Grand’mère souhaitait bien à madame la princesse tout le bonheur possible, elle avait prié pour elle chaque jour ; mais si à l’arrivée de la princesse ne s’était pas trouvé jointe celle de son gendre, il lui aurait été égal de la voir ou de ne la pas voir. Mais cette fois c’était avec impatience qu’elle l’attendait ; elle avait de la revoir un motif secret dont elle n’avait dit mot à personne.

C’est au commencement du mois d’août que l’on met les faux dans les blés, et dès le premier jour de la moisson madame la princesse arriva en effet avec toute sa suite. La fille de l’administrateur attendait son italien ; mais on lui eut bientôt donné à savoir que la princesse l’avait laissé à la capitale. Madame Proschek était rayonnante de joie ; les enfants revoyaient enfin leur père chéri ; toutefois le visage de grand’mère se rembrunit un peu, quand elle reconnut que sa fille Jeanne n’était point venue avec M. Proschek. Mais celui-ci était porteur d’une