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soit bien entendu dans son métier, et il peut devenir tout aussi estimable que n’importe quel seigneur. Et Georges était heureux que mon père ne fût point irrité contre lui ; car il le regardait comme son propre père. Novotná finit par être calmée, et comment ne l’eut-elle pas été enfin ? Après tout, c’était son enfant et elle ne pouvait vouloir qu’il se sentît malheureux dans un état embrassé malgré lui. Il ne passa que quelques jours auprès de nous repartit pour continuer son tour, et nous étions restés trois ans sans le voir, et presque sans entendre parler de lui, lorsqu’un matin je le vis se présenter devant moi.

Je le reconnus tout de suite, quoiqu’il fut bien changé ; il était extraordinairement grand, et si bien fait qu’on n’eut pas facilement trouvé son pareil. Il se pencha vers moi et me prit la main en me demandant pourquoi je m’étais tant effrayée à son aspect ? « Comment n’eussé-je pas été effrayée ? lui dis-je : tu t’es trouvé ici comme si tu étais tombé des nuages. D’où et quand es-tu arrivé ?

« J’arrive directement de Glatz ; mon oncle est dans les transes, parce que le recrutement se fait partout alentour et il craint que les enrôleurs ne me surprennent. C’est pourquoi à peine étais-je de retour auprès de lui, qu’il m’envoyait en Bohême dans la pensée qu’il me serait plus facile de m’y tenir caché. J’ai pu franchir heureusement les montagnes, et me voici !

« Mon Dieu, lui dis-je, pourvu qu’on ne vienne pas te rechercher ici ! Qu’est-ce que ta mère en dit ? »

« Je ne l’ai pas encore vue. Je suis arrivé à deux heures de la nuit. Je n’ai pas voulu la réveil-