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les chats accouraient à ses pieds. Les chiens s’élançaient de leur chenil ; en un saut ils étaient près d’elle ; assurément, si elle n’eut pas pris garde, ils l’auraient renversée elle-même, ou encore lui auraient fait tomber des mains le panier de paille, rempli des graines à leur usage. Tous les animaux aimaient grand’mère, qui de son côté les aimait aussi. Elle ne voulait pas voir que l’on fît mal, même à un vermisseau, car elle disait souvent : « Quand on doit tuer des animaux pour son utilité, ou à cause du dommage qu’ils causent, tuons-les ; mais ne les tyrannisons jamais. » Les enfants n’avaient pas la permission de regarder tuer un poulet, par le motif qu’ils en auraient de la pitié, et que le poulet ne pourrait pas mourir.

Elle se fâcha une fois très-fort contre les deux chiens, Sultan et Tyrle. Mais il y avait de quoi. Ils avaient miné la terre sous la petite étable et étranglé en une nuit douze canetons qui étaient si gentils à voir. Les bras de grand’mère lui tombèrent, quand elle ouvrit la porte de l’étable, et que l’oie, avec trois canards, seuls survivants, courait en dehors tout effrayée, et comme en se lamentant pour ces petits qu’on avait tués, et qu’elle avait couvés au lieu et place de leur inconstante et vagabonde mère. Dans le premier moment, grand’mère accusait la martre ; mais des traces l’eurent bientôt convaincue que c’étaient les chiens ! Elle ne pouvait en croire ses yeux. Mais oui ! C’étaient les chiens, ces gardiens fidèles, et ils s’avançaient encore pour la flatter ! Ce fut ce qui mit grand’mère en si grande colère : « Allez-vous en, brigands ! Qu’est-ce que les