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jamais à bout. Ils en avaient bien la volonté, mais non la force. Le jour de Noël, tout être recevait son noël : car la volaille et le bétail même avaient aussi leurs parts des gâteaux au jour. Après le souper du jour grand’mère prenait de chaque aliment qu’il y avait paru, un petit morceau dont elle jetait la moitié dans l’étang, tandis qu’elle enterrait l’autre moitié dans le verger au pied d’un arbre ; c’était pour que l’eau restât pure et saine toute l’année ; et la terre, féconde : enfin elle jeta toutes les miettes dans le feu, « pour que cet élément ne fût pas nuisible. »

Un moment après Betka sortit pour secouer le sureau, en criant : « Je secoue, je secoue le sureau ; dis moi, toi, chien où mon bien-aimé soupe aujourd’hui ; » et les jeunes filles fondirent dans la chambre du plomb et de la cire ; les enfants mirent des petites chandelles dans des coquilles de noix, pour les faire voguer sur l’eau. Jean poussa secrètement le bassin rempli d’eau pour l’agiter. Mais alors les coquilles de noix qu’il portait, et qui étaient censées représenter les barques de la vie flottèrent du bord vers le milieu du bassin ; aussi il s’écria joyeusement : « Regardez, regardez ! j’irai loin, bien loin dans le monde. »

« Ah, cher enfant, lui dit sa mère, quand tu seras livré au courant de la vie parmi les tourbillons et ses écueils ; quand les vagues soulevées agiteront la barque de ta vie, tu te rappelleras, avec l’ardeur des soupirs le port silencieux, d’où tu seras parti. Et tout en proférant ces mots, avec son calme habituel, la mère, coupait en deux, et par le milieu