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chambrette, près de sa grand’maman. Au milieu, une table en bois de tilleul était portée sur des tréteaux ; et au-dessus de la table, on voyait, suspendue au plafond, une colombe, image du Saint-Esprit. Dans un angle, auprès de la fenêtre, étaient un rouet à filer et une quenouille avec son bâton bien garni ; dans la quenouille était engagé le fuseau ; à un clou était accroché le dévidoir. Sur la muraille étaient appendues plusieurs images des Saints ; et au-dessus du lit de grand’mère, un crucifix, paré de fleurs. Entre les fenêtres, on voyait s’étaler, dans des pots, la verdure de mercuriales et de muscades ; et dans des sacs de toile, celle de différentes plantes médicinales : fleurs de tilleul et de sureau, camomille des champs, et autres ; c’était sa pharmacie. Derrière la porte était fixé son bénitier d’étain. Dans le tiroir de la table, elle avait son ouvrage de couture, un petit recueil de cantiques pieux, un livret du Chemin de la Croix, un petit paquet de cordons en provision pour le rouet, de la craie du Jour des trois Rois Mages, un cierge, bénit du jour de la Chandeleur, et qu’elle tenait en réserve, pour être allumé en temps d’orage. Sur le poêle, il y avait un briquet à amadou. Dans la salle, certes, pour allumer la chandelle, on se servait habituellement d’une petite bouteille de phospore ; mais elle ne voulait pas se servir de ces inventions du diable. Elle n’avait essayé qu’une fois ; et qui sait comment elle s’y était prise ? Elle y avait brûlé un tablier qu’elle possédait depuis vingt-cinq ans, sans compter qu’elle avait failli être suffoquée. À dater de ce jour-là, elle ne toucha plus à la bouteille de phosphore ; et tout aussitôt elle se pourvut d’amorce. Les enfants lui