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il faut donc supporter son absence avec patience. — Et vous, mes chers enfants, taisez vous aussi ; mais faites des prières pour votre père, afin que le bon Dieu lui conserve la santé, et nous le ramène au printemps. »

« Sera-ce avec le retour des hirondelles ? » demanda Adèle.

« Tu le sais bien, dit grand’mère, en lui donnant raison, et la fillette essuya ses larmes. »

Et tout autour de la Blanchisserie régnaient la tristesse et le silence. Le bois devint plus clair ; aussi quand Victoire descendait de la montagne on la voyait venir de loin. La verdure, jusqu’à la côte, jaunit ; le vent et les ondes du ruisseau emportaient, Dieu sait oh, des tourbillons de feuilles sèches et l’ornement du verger était déjà serré dans la cave. Dans le petit jardin on ne voyait plus de fleuris que des asters, et des soucis ; les autres fleurs se mouraient, des colchiques fleurissaient dans la prairie derrière la digue, et les feux follets se livraient pendant la nuit à leurs danses désordonnées. Quand grand’mère allait en promenade avec les enfants, les garçons n’oublièrent point d’emporter leurs cerfs volants, qu’ils lâchaient plus loin sur la montagne. Adèle courait derrière eux, attrappant sur une baguette les fins fils de la Vierge qui volaient en air. Barounka ramassait sur la côte des obiers rouges et des prunelles, dont grand’mère se servait en médecine ; ou bien elle cueillait le fruit de l’églantier dont on avait besoin dans le ménage ; ou encore elle abattait les grains du sorbier, dont elle faisait pour Adèle des colliers et des bracelets. Grand’mère