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« Ne pense pas à des choses pareilles, quand monsieur l’administrateur voit les choses en noir, on trouve bien moyen de lui boucher les yeux. Oui, mais c’est là une chose qui pour se faire quelque fois ne réussit cependant pas toujours. Cependant j’ai rêvé la nuit de la saint Jean que Mila était venu me voir et que nous allions nous marier ; mais un rêve n’est qu’un rêve, et grand’mère dit toujours qu’il ne nous est pas permis d’ajouter foi aux superstitions, ni de vouloir que le bon Dieu nous dise comment il en usera avec nous dans l’avenir.

« Mais grand’mère n’est pourtant pas l’évangile. »

« Je crois à grand’mère comme à la Sainte Écriture ; ses conseils partent d’un jugement droit et tout le monde dit que c’est une femme parfaite ; tout ce qu’elle pourrait dire est la vérité sacro-sainte.

« Je parierais bien mon petit doigt que quand elle était jeune, elle croyait à ce que nous croyons. Les vieilles gens sont tous les mêmes ; notre mère en est toujours à gémir de ce que les jeunes gens ne pensent qu’au plaisir, à la danse, aux réjouissances ; mais que pour de la raison, ils n’en montrent pas un brin. Elle répète sans cesse que ce n’était pas comme cela dans ses jeunes années ; et moi, je sais de bonne source que notre bisaïeule, en fait de sagesse, n’était pas en avance sur nous de l’épaisseur d’un cheveu ; et nous mêmes, quand nous serons, à notre tour, devenues grand’mère, nous redirons les mêmes chansons. Allons ! dormons maintenant après nous être encore recommandées à la Mère de Dieu, dit Anna, et elle se recoquilla dans