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mais dois-je donc tuer à moitié une femme âgée, quand elle ramasse un morceau un peu plus fort de quoi se faire un manche d’outil, comme quelques uns en font ? Je pense toujours que leurs seigneuries n’en vivront pas moins bien ; que les pauvres gens vivront aussi autour d’eux et qu’ils leur en donneront mille remerciements. Tout cela, je ne le compte pas comme dégât,

« Vous faites très bien d’en agir ainsi, » dit la princesse.

« Mais il faut pourtant qu’il y ait par ici de méchantes gens. Car Piccolo qui revenait avant hier, dans la nuit, de la petite ville, s’est ou à la faisanderie au moment d’être dépouillé ; et comme il se défendait, même par ses cris, ils l’ont frappé jusqu’à ce qu’il restât sur le carreau ; on dit qu’il est encore malade. »

« Pour cela madame la princesse, voilà bien quelque chose que je suis loin de croire comme article de foi, » dit monsieur Proschek. De notre vie nous n’avons entendu parler de brigands qui eussent été à la faisanderie, ou dans le voisinage, dirent à la fois le chasseur et le meûnier.

« Qu’est-ce qui est donc arrivé ? » demanda grand’mère en s’avançant vers eux.

Le chasseur le lui raconta.

« Mais quel menteur fieffé ? s’exclama grand’mère indignée et tout en mettant les mains sur ses hanches. Il ne craint donc pas la punition de bon Dieu. C’est moi qui vais raconter la chose et bien autrement, à madame la princesse. »