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souhaite nous plutôt la joie de nous entendre toujours ainsi ; » et les enfants d’écouter grand’mère. L’un se met sur ses genoux ; l’autre s’assied, derrière elle, sur un banc ; et Barounka reste debout, devant elle, sans cesser de la regarder. Celui-ci s’étonne de lui voir des cheveux blancs comme neige ; celui-là, qu’elle ait les mains ridées ; et le troisième ose dire ; « Mais, grand’mère, vous n’avez plus que quatre dents ! » La grand’maman se prend à sourire, et caressant les cheveux châtains de Barounka : « Oui, parce que je suis vieille, répond-elle ; et quand vous deviendrez vieux, vous serez aussi bien changés. » Et les enfants de ne point comprendre comment leurs mains, alors lisses et blanches, pourraient bien être, un jour, ridées à l’égal de celles de grand’mère.

Ce fut ainsi que, dès la première heure, elle sut se gagner entièrement les cœurs de ses petits enfants : elle s’était donnée à eux, tout de suite, et toute entière. M. Proschek, son gendre, que jusqu’alors elle n’avait point connu personnellement, conquit également son affection, et dès la première rencontre, par sa cordialité et par un extérieur avantageux, où reluisaient la bonté et la franchise. Il n’y avait en lui qu’une chose qui déplût à grand’mère, et c’était qu’il ne parlât point le bohême. Quant à elle, il y avait longtemps qu’elle se trouvait avoir oublié le peu d’allemand qu’elle avait su autrefois ! Et cependant, elle aurait été si heureuse de causer un peu avec Jean ! Elle eut la consolation d’apprendre que Jean entendait le bohême, et que la conversation se faisait à deux langues, dans la maison. Les enfants et les domestiques parlaient bohême à M. Proschek,