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empêché de mourir. Ce sont les livres qui le nourrissent ; je le remercie bien d’un pareil régime. Et Susanne parlait toujours ainsi. Elle me fit entrer une fois dans sa chambre ; je n’ai jamais vu plus de livres ; ils étaient entassés comme des cordes de bois. Eh bien ! voyez, Madeleine, me disait-elle toujours, notre vieux à tout cela dans la tête ; je m’étonne qu’il n’en soit pas encore devenu fou. — C’est comme ça : si je n’étais pas ici, et si je ne prennais pas garde à lui, comme à un petit enfant, Dieu seul sait ce qu’il deviendrait : il faut que je m’entende à tout ; car lui, il ne comprend rien, que ses livres. Et il me faut avoir une sainte patience avec lui. Je crie aussi quelquefois après lui ; mais il part sans y prendre garde et, cela me fait de la peine. Mais quelquefois je suis obligée de le houspiller, tant il devient insupportable : Figurez-vous, Madeleine qu’il y avait autant de poussière dans sa chambre que sur la place du village ; et autant de toiles d’araignée que dans un vieux clocher. Eh bien ? Croyez-vous qu’il m’ait permis d’y venir avec un balai ? Point du tout. Je me dis alors : Attends, va, je saurai bien t’attraper. Oh ! ce n’est de lui que je me souciais, mais c’était de ma renommée de bonne ménagère. N’était-ce pas honteux pour moi que quelqu’un entrât chez lui, pour voir tout ce beau désordre ? Je priai un monsieur de sa connaissance et qu’il fréquentait de préférence de vouloir bien, le retenir quelque part ; et voilà que pendant son absence, je me mis à laver à épousseter partout, et je mis tout au plus grand ordre. Et voyez, Madeleine, quel homme singulier ! Il a bien été trois jours