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Hortense appuya sa tête sur la petite tête de la fillette, et ne retint plus ses larmes qui coulèrent le long de ses joues.

« Mademoiselle s’est souvenue de sa patrie et de ses amis », dit grand’mère. « Vous, enfants ! vous ne savez pas encore ce que c’est que d’être obligé d’abandonner le lieu où l’on a été élevé. On ne peut l’oublier, quand même on serait encore assez heureux à l’étranger. Vous le ressentirez aussi quelque jour. Mademoiselle a là assurément des parents ? »

« Je n’ai pas au monde des parents que je connaisse, » répondit la comtesse tristement. « Ma bonne gouvernante, ma chère Giovanna, vit à Florence ; et je ressens quelquefois un chagrin si grand d’être éloignée d’elle et de ma patrie ! Mais la princesse, ma bonne mère, m’a promis d’y faire bientôt un voyage avec moi. »

« Et comment se fait-il que madame la princesse soit allée vous trouver si loin ? » demanda grand’mère.

« C’est que madame la princesse a bien connu ma mère ; elles étaient amies. Mon père, dangereusement blessé à la bataille de Leipsic, est mort, en suite de sa blessure, quelques années après, à sa villa près de Florence, et ma mère en a eu tant de chagrin qu’elle en est morte. Et moi, petite orpheline, je restai seule au monde. À cette nouvelle, madame la princesse est arrivée, et elle m’aurait emmenée tout de suite avec elle, si Giovanna ne m’avait pas aimée comme son enfant. Elle me laissa donc chez elle, en mettant sous son pouvoir le château avec tout ce qu’il contenait ; Giovanna eut soin de