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en envoient chercher chez moi. Il est toujours bon d’avoir chez soi ces remèdes ; car si on n’en pas besoin soi-même, on peut en faire part aux autres. »

N’y a-t-il pas de pharmacie à la petite ville ? » demanda la comtesse.

Ce n’est pas en ville qu’elle se trouve, mais à une lieue d’ici. Et de quoi servirait-il qu’elle fût à la ville ? La préparation latine du laboratoire devient une cuisine trop chère — Puis, pourquoi acheter si cher ce que nous savons préparer nous-mêmes ? »

« Le docteur vous écrit-il la recette, selon laquelle vous devez les faire bouillir ? »

« Oh, que non ! mademoiselle ! Est-il donc nécessaire d’appeler le docteur pour un petit malaise ? Il demeure à une heure de chemin, et il se passe bien une demi-journée avant qu’il arrive. Si l’on n’avait pas de remèdes chez soi, on pourrait mourir avant son arrivée. Et enfin, quand il arrive, il prescrit tant de remèdes, de potions, d’emplâtres, de sangsues qu’on en perd la tête, et que le malade en devient plus malade encore. Je ne crois pas aux médecins, et quand nous sommes indisposés, quelqu’un des enfants, ou moi, mes herbes suffisent. Que si quelqu’un tombe malade, je dis pourtant : « Envoyez chercher le médecin ! » Si c’est Dieu qui visite le malade par une maladie grave, les médecins sont bientôt à bout de leur savoir ; ils laissent, disent-ils, agir la nature qui doit se venir en aide à elle-même. C’est le bon Dieu pourtant qui est le meilleur médecin ; si l’on doit vivre, on se guérit sans docteur ; mais si l’on doit mourir, toute une pharmacie ne saurait en empêcher. »