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amis. Le sang, dit-on, n’est point de l’eau ; aussi l’amour des enfants vainquit la longue accoutumance, et grand’mère se décida à partir. Elle laissa sa chaumière, avec tout ce qu’il y avait, à la vieille Betka, mais en ajoutant : « Je ne sais pourtant pas si je me plairai, et si je ne reviendrai pas mourir au milieu de vous. »

Quelques jours après, une voiture s’arrêtait à la porte : Venceslas y chargea le bahut de grand’mère, tout enjolivé de peintures ; puis, un panier contenant quatre poules huppées ; un petit sac dans lequel miaulaient deux chatons quadricolores ; enfin il fit monter grand’mère, de qui les larmes obscurcissaient la vue ; mais les bénédictions de ses amis la suivaient vers sa nouvelle demeure.

Quelles attentes, et partant quelles joies à la Vieille-Blanchisserie ! C’est ainsi qu’on nommait une construction solitaire dans un charmant vallon, et réservée pour domicile à Mme. Proschek. Ses enfants couraient, à tout moment, pour voir arriver Venceslas, et répétaient à tous ceux qu’ils trouvaient en chemin : « C’est aujourd’hui qu’arrive notre grand’maman ! » Entre eux, ils se demandaient sans cesse : « Comment sera-t-elle ? »

Ils connaissaient bien plusieurs grand’mères, dont ils se représentaient les traits, mais sans savoir à laquelle la leur ressemblait. Enfin une voiture s’arrête à la porte : « Grand’mère est arrivée ! » Le cri en retentit dans la maison. M. Proschek, sa femme, Betka portant sur son bras une petite fille, qui s’essayait déjà à courir, mais qui ne parlait pas encore ; les autres enfants, avec deux grands chiens,