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bien autant que moi Georges lui avait fait une haie de baguettes autour du jardin. Oui, c’était encore la même haie, mais le jardin était couvert d’herbe ; on n’y voyait encore que quelques vignons. Un chien à moitié aveugle sortit du chenil. « Chlupasch, me connais-tu ? » lui criai-je, et le chien se mit à aboyer joyeusement à mes pieds. Je pensai que mon cœur allait se fendre à ce spectacle d’une face muette qui me reconnaissait. Les enfants me regardaient avec étonnement parce que je pleurais ; mais je ne leur dis rien que j’allais chez leur grand’mère ; car je ne voulais pas qu’ils le sussent au cas que mes parents, fâchés contre moi, me recevraient mal. L’aîné des enfants, Gaspard, me dit : « Pourquoi pleures-tu, maman, n’aurons nous pas de couchée ici ? Assieds-toi et repose-toi ; nous attendrons et je porterai ton paquet. « Nous n’avons pas faim ! » Jeannette et Thérèse affirmèrent aussi qu’elles n’avaient pas faim, quoique les pauvres enfants n’eussent pas mangé depuis plusieurs heures — et que nous eussions marché à travers les bois, sans qu’il se trouvât sur notre chemin aucune maison.

« Non, mes enfants, leur dis-je ; car voici le bâtiment où est né votre père ; Voici à côté celui où est née votre mère ; c’est ici que demeurent votre grand’père et votre grand’mère. Remercions Dieu de nous avoir heureusement conduits jusqu’ici, et prions-le qu’il daigne nous ménager un accueil paternel. Nous dîmes un pater noter, puis je m’avançai vers la porte de la chaumière. Sur la petite porte était clouée une petite image de la sainte Vierge, que Georges avait apportée autrefois à sa mère de