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rois complètement ivre, qui s’était laissé capturer de bonne grâce et qui n’était autre que lui-même, venant informer notre chef du mouvement rétrograde de notre armée et de la marche audacieuse de Frédérick-Charles vers Orléans, sur les talons du 15e corps.

Ah ! il en savait long, tout de même, le vieux chacal qui ne voulait rien savoir, et les officiers pleurèrent de rage en l’écoutant.

Il avait bien essayé de courir après Martin des Pallières, mais il aurait fallu des ailes pour l’atteindre, ce général de la gaffe, qui se trouvait encore une fois, comme à Beaune-la-Rolande, à vingt ou trente kilomètres du point où sa présence eût pu être funeste à l’ennemi.

Jamais une pareille occasion ne s’était présentée. Quarante-cinq mille hommes engagés sur la seule route qui conduit de Pithiviers à Orléans, au milieu des bois touffus, sans moyen de se développer, soit à droite, soit à gauche. Les troupes françaises, composées en grande partie de mobiles peu solides en rase campagne, étaient capables, néanmoins, soutenues et entraînées par leurs officiers, de tenir et même de prendre très résolument l’offensive sous bois et derrière les obstacles que présentait la forêt. La longue colonne des Prussiens, vigoureusement attaquée sur son flanc, arrêtée et prise en tête, n’aurait pu se maintenir dans un semblable défilé. Le Prince téméraire était forcé de se retirer en perdant beaucoup de monde, et