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Enfin toute sa personne exhalait l’odeur d’un palier d’hôtel garni de vingtième ordre, au sixième étage.

Elle était néanmoins fort admirée de tout un groupe de jeunes anglaises dont l’indépendance était assurée par l’élevage des bestiaux ou le trafic international de ces précieux nègres qui blanchissent en vieillissant.

On venait de divers points du Royaume-Uni chez mademoiselle du Tesson, pour apprendre la littérature et les hautes façons du grand siècle dont elle était la dernière et la plus illustre professoresse.

Mais elle entendait que ces disciples gracieuses fussent encore plus ses amies que ses écolières. Persuadée, peut-être par son expérience personnelle, que le cœur d’une jeune fille est un gouffre de turpitudes et de crimes, elle les incitait à la confiance, les tisonnait de questions bizarres, de suggestives et corruptrices demandes, se faisait l’ouvreuse de leurs âmes.

En échange des aveux dont elle avait soif, elle offrait sa protection. Comme elle avait le renom d’une femme très supérieure, les petites volailles se laissaient ordinairement soutirer, en même temps que leur propre histoire, les histoires plus ou moins carabinées de leurs parents ou de leurs proches.

Mademoiselle du Tesson se disait catholique, mais n’approuvait pas la messe et parlait avec un vif enthousiasme des beautés du protestantisme.