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d’arabesques, de feuillages impossibles, d’enroulements inextricables, de figures monstrueuses insolitement coloriées, où les quelques syllabes exprimant son bon plaisir s’imposaient rudement à l’œil en onciales carlovingiennes ou caractères anglo-saxons, les deux écritures les plus énergiques, depuis la rectiligne capitale des éphémérides consulaires.

Un mépris gothique pour toutes les manigances contemporaines lui avait donné le besoin, le goût passionné de ces formes vénérables, dans lesquelles il faisait entrer sa pensée comme il aurait fait entrer ses membres dans une armure.

Peu à peu la lettre ornée lui avait inspiré l’ambition de la lettrine historiée, puis de la miniature détachée du texte, avec toutes ses conséquences, — conformément à la progression de cet art primordial et générateur des autres arts, commençant à la pauvre transcription des moines mérovingiens pour aboutir, après une demi-douzaine de siècles, à Van Eyck, Cimabué et Orcagna qui continuèrent sur la toile, avec des couleurs plus matérielles dont la Renaissance allait abuser, les traditions esthétiques du spirituel Moyen Âge.

Son habileté devint prodigieuse aussitôt qu’il eût décidé d’en tirer parti et il apparut un artiste merveilleux, de l’originalité la plus imprévue.

Il avait étudié avec soin et consultait sans cesse