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Ce n’était pourtant pas que M. Vertige fût un homme précisément adorable. Ah ! Dieu, non. Il sentait le bouc, avait un caractère diabolique et ne possédait pas un globule d’enthousiasme pour sa femme.

Mais on trouvait en lui ce ragoût, cette espèce de je ne sais quoi qui fait qu’on revient toujours à ces animaux. C’est inexplicable sans doute, mais trop certain.

Elle pouvait se rendre cette justice d’avoir fait généreusement, avant leur divorce, tout ce qu’une bonne femme peut faire pour se dégoûter de son mari. Elle s’était crue même tout à fait sûre de réussir. Elle avait eu plusieurs amants d’une distinction peu ordinaire. Le premier surtout, oh ! le premier, un employé supérieur de l’administration des Catacombes, qui l’avait lâchée malheureusement, était, on pouvait le dire sans crainte, le type idéal.

Eh ! bien, ces tentatives heureuses et le divorce favorable qui en fut la conséquence n’avaient pu l’opérer complètement de son mari. Elle pensait toujours à ce vilain homme et ne parvenait pas à s’en empêcher.

Elle n’allait pas, sans doute, jusqu’à déplorer de n’être plus madame Vertige, mais il lui devenait chaque jour plus clair que l’époux banni avait été le condiment indispensable de ses joies. En d’autres termes, l’amour était sans saveur depuis qu’elle n’encornait plus un tenancier légitime.