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déployant ses ailes au milieu des flammes et cette inscription terrifiante exigée par le défunt :


JE RENAÎTRAI.


Il alla faire un tour en bicyclette, afin de se retremper la fibre par une énergique prise d’air, déjeuna copieusement, reçut quelques visites éplorées, alla faire ses dévotions à la Bourse, opéra, vers le soir, quelques recouvrements profitables et passa la nuit hors de la maison pour marquer la violence extrême de son chagrin.

Le lendemain, un somptueux corbillard jonché de fleurs et suivi d’une foule peu recueillie apportait au Crématoire la dépouille du décédé.

— Ah ! ah ! tu renaîtras ! disait en lui-même l’affable Dieudonné, resté seul dans la terrible chambre ardente avec les deux hommes chargés d’enfourner son père, nous allons bien voir si tu renaîtras !…

La bière, administrativement et réglementairement façonnée en planches légères, pour être dévorée soudain par une atmosphère de sept cents degrés, reposait sur le chariot mécanique dont les deux antennes de métal, lancées avec force, plongent les morts dans la fournaise et reculent en poussant un cri, mouvement diastole et systole qui s’exécute en vingt-cinq secondes.

Dieudonné en était donc là de son recueillement