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deville donnée au bénéfice de la veuve du malheureux poète-inventeur Charles Cros, mort dans la misère, avec l’insuffisante consolation d’avoir fait gagner quelques millions à l’Américain Edison, inventeur du phonographe dix ans après lui.

Ah ! c’était une belle matinée de janvier que cette après-midi du Vaudeville, je vous en réponds ! Il y avait, s’il faut tout dire, la plénière dégoûtation que voici :

Un petit éditeur de cochonneries juvéniles qui s’occupe, en outre, de beaucoup de choses, et dont le génie mercantile est suffisamment annoncé par un profil de jeune mouflon ou d’adolescent alpaca, s’était beaucoup agité pour procurer à la veuve infortunée du poète le réconfort d’une matinée à bénéfice. En conséquence, il avait couru partout, sans lassitude, pendant un mois, requérant les amis anciens du défunt pour leur faire acheter des billets, cramponnant ceux qui pouvaient ravir le public pour qu’ils payassent de leurs personnes.

Au fond, il s’agissait, pour cet entrepreneur de consolation, d’obtenir par le moyen de cet admirable raccroc, la gratuite représentation d’une opérette qu’il avait enfantée dans la douleur et dont la sottise indomptable eût épouvanté le plus audacieux des directeurs sublunaires.

Mon ancienne amitié pour le pauvre Cros m’ayant conduit à me fréter de quelques informations, j’ai simplement appris que l’organisa-