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à la forme littéraire, il n’y en a pas. C’est de la lave liquide. C’est insensé, noir et dévorant.

« Mais ne semble-t-il pas à ceux qui l’ont lue, que cette diffamation inouïe de la Providence exhale, par anticipation, — avec l’inégalable autorité d’une Prophétie, — l’ultime clameur imminente de la conscience humaine devant son Juge ?… »

Il paraît aujourd’hui que cet avertissement n’a pas été inutile et qu’une édition nouvelle, enfin se prépare. L’affaire, je crois, sera bonne. En tout cas, c’est une expérience des plus curieuses. Cet extraordinaire poème en prose devenu presque rarissime et connu seulement de quelques artistes qui se le passent, avec force recommandations, de mains en mains, va tomber précisément dans l’axe de la plus active cogitation des âmes profondes en cette fin de siècle.

Le scandale sera grand peut-être et, ma foi ! tant mieux. L’Évangile n’enseigne-t-il pas que le scandale est nécessaire ?

Quant au danger de la contagion, je ne puis y croire. C’est un aliéné qui parle, le plus déplorable, le plus déchirant des aliénés et l’immense pitié mélangée d’indicible horreur qu’il inspire, doit être, pour la raison, le plus efficace des prophylactiques. « Le désespoir porté assez loin, dit Carlyle, complète le cercle et redevient une sorte d’espérance ardente et féconde. »

Exceptionnellement, je croirais plutôt à la pédagogie salutaire de cette douleur sans mesure,