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« Chaque fois qu’une Amazone tuait un ennemi, elle recevait un homme dans ses bras », à l’instant des écailles tombèrent de ses yeux, et l’innocente eut enfin la clef de l’amour et du mariage. Eh ! bien, ce matin, je lis ceci dans le Jardin de Bérénice : « Certains hommes ont du génie, comme les éléphants ont une trompe. »

Aussitôt, je ne sais comment ni pourquoi, un voile épais se déchire et je trouve la clef de Barrès. Tout s’éclaire.

Ah ! cet amour narcisséen de lui-même ; — le vœu exprimé dans l’Homme libre, de « s’anémier, tant il a le goût des frissons délicats » ; — son peu de confiance dans les autres ; — son Moi (?) présenté comme une idole jalouse qui ne veut pas qu’on la délaisse ; — son indulgence faite de compréhension, qui doit s’étendre jusqu’à sa propre faiblesse ; le renouvellement de sa fiction chaque soir ; — les prières qu’il s’adresse à lui-même et les promesses qu’il se fait de ne pas se délaisser ; etc., etc., enfin la crainte « qu’un jour, ne fût-ce qu’à sa dernière nuit, sur son oreiller froissé et brûlant, il ait à regretter de n’avoir pas suffisamment joui de lui-même »…

J’y suis maintenant, et je connais enfin le vrai nom, que je cherchais depuis tant de jours, de ce Moi énigmatique appelé par lui, quelquefois, simplement l’Objet et, d’une manière plus précise, Petite Secousse, à la fin du troisième volume, comme si lui-même se lassait enfin de tant de rébus.