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je l’espère bien, jusqu’à l’heure climatérique où la capricieuse fortune s’avisant enfin, malgré tout, d’un écrivain que les noctambules de lettres ont proscrit, il sera vociféré dans les antichambres que mon attitude fut honorable.

On comprendra, sans doute, alors, que tout cela était moins facile, en somme que de plaire aux dames exquises en faisant la putain de lettres, et, peut-être, les plus bêtes ou les plus cochons commenceront-ils d’entrevoir les raisons d’ordre supérieur qui me font si fier de ce renom de pauvreté dont prétendent m’avilir les valets de chambre, les frotteurs ou les cuisiniers du Succès.

Pour ce qui est des bottes vengeresses, encore une fois, il y a beau temps que je désespère de les rencontrer, et voici une anecdote pour finir.

Un jour, il m’arriva d’être fusillé presque à bout portant par deux ou trois mille Prussiens. On devine que c’était 1870. — Bourget était-il, alors, beaucoup plus jeune qu’aujourd’hui ? je n’ose le croire. — Moi, j’avais vingt-quatre ans et je ne moisissais pas sur les pots de chambre.

Mon commandant m’avait choisi pour dérober à la rage allemande une vingtaine de traînards aplatis dans un fossé, au-dessous de la fusillade qui était assez nourrie pour déterminer un bourdonnement ou même un grêlonnement continu. Une petite rivière imparfaitement gelée nous