Page:Bloy - Belluaires et porchers, 1905.djvu/284

Cette page a été validée par deux contributeurs.

J’aime la pierre qui donne à « sucer le miel » et l’incassable rocher donneur d’huile que Moïse annonça dans son grand cantique. J’aime la pierre choisie par Jacob pour y reposer son chef dormant quand il vit l’échelle qui touchait le ciel et sur laquelle Dieu s’appuyait afin de lui dire : Je suis le Seigneur Dieu de ton père. J’aime la pierre du scandale et la pierre « d’incommodité ». J’aime la pierre détachée de la montagne sine manibus et qui renversa le colosse aux cinq matières, selon qu’il est expliqué par Daniel révélateur de ce « sacrement ».

J’aime la pierre excessivement limpide sur laquelle il faut que soit répandu le sang de la criminelle cité. J’aime par dessus tout le silex vers lequel le Dieu de Job « étend sa main » comme un simple homme qui ne parviendrait pas à refréner son désir. J’aime la pierre d’Habacuc poussant sa clameur du milieu d’un mur et la pierre du même prophète qui a résolu de se taire. J’aime les pierres lépreuses qu’il est ordonné de jeter dans les lieux immondes et les autres pierres « informes et impolies » qu’il n’est pas permis de travailler parce qu’elles appartiennent à l’autel de Dieu.

J’aime aussi, — que cela me soit pardonné ! — la pierre insigne de cet effrayant Lévitique où n’est point admise la prétentaine, que le même Seigneur jaloux ne permet pas qu’on adore. Voulez-vous me dire son nom, monsieur le lapidaire ?