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moins pour que le Stabat Mater devînt possible.

Il n’avait pas été agréable, ni utile, mais absolument nécessaire que l’univers fût dompté, confisqué, pétri, amalgamé par soixante portées consécutives de la Louve, et que trente ou quarante peuples fussent cloîtrés mille ans par des verbes implacables sous des gérondifs en marbre noir et dans des supins d’airain.

Il avait été prodigieusement indispensable que s’opérassent des immolations infinies, des supplices de multitude, des attentats indicibles contre la Ressemblance coupable de Dieu.

On avait écorché vivants le Mède et le Perse, brûlé les Carthaginois et les Numantins, aveuglé les Daces, mutilé les Grecs et les Égyptiens, avili les Gaulois et les Espagnols, prostitué jusqu’aux Germains et jusqu’aux Bretons. Enfin on avait abattu six cent mille Juifs à la prise de Jérusalem.

Tout cela réparti sans interruption ni futiles attendrissements sur un tiers du globe, en l’espace de dix fois cent ans, pour accréditer un impératif, un unique Impératif qui sauvait le monde :

CRUCIFIGE !…

Après cela, les Barbares étaient venus pâturer la syntaxe du Commandement et de la Prière dans les Plaies du Christ.

Ils apportaient naturellement avec eux les cailloux du Rhin, les durs et coupants silex de Franconie ou de Saxonie, les émeraudes gothiques,