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C’est un chapitre à la louange de madame Hello, bien entendu, comme tous les autres, sans exception, mais plus spécialement écrit sous sa dictée.

Le copiste ayant établi que « la même main qui n’avait qu’à se promener sur les touches du piano pour en faire jaillir des flots d’harmonie, n’était pas moins remarquable à faire rôtir un poulet », termine le poème de la très-savante cuisson d’un bifteck, absolument indispensable à l’éclosion des pensers sublimes, par cette simple réflexion que j’oserai qualifier de virginale :

« Le couteau de cuisine que vous voyez entre les mains de la femme d’Ernest Hello est, pour elle, un moyen de tailler la plume de son mari. »

On a soin de rappeler que cette épouse, « étant la gardienne de ce beau génie, a, de la sorte, collaboré à son œuvre et qu’elle a sa part CACHÉE (!!!) dans ses inspirations ». Il ne tient qu’à nous de conclure que les dix ou quinze grands chapitres de l’Homme ou les deux cents pages sublimes éparpillées çà et là furent beaucoup moins écrits que rotés après d’excellents repas.

« Nul ne sait ce que peut une côtelette tendre sur l’esprit d’un homme. »

Il y a aussi l’histoire d’un chien consolé toute la nuit par madame Hello pour qu’il ne troublât pas de ses hurlements le sommeil du « cher malade », anecdote quelque peu déshonorante pour son mari, que l’héroïne raconte sans fatigue à toute la terre, depuis environ vingt ans.