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lifat des intelligences chrétiennes. Alors, il trouva l’expédient d’offrir à cet indompté, un tout petit mors d’acier fin dont l’effet répulsif n’était pas douteux, se jurant, sans doute, à lui-même de mieux surveiller sa langue désormais et de ne plus s’aventurer en d’aussi téméraires pollicitations.

Le premier des écrivains catholiques modernes n’a donc jamais pu écrire dans un journal catholique, et l’unique roman chrétien qui puisse être lu par des êtres appartenant à l’espèce humaine, le Prêtre marié, miraculeusement édité dans un pieux bazar, fut aussitôt mis au pilon sur l’ordre formel de l’Archevêché de Paris.

Seulement, il aurait, en même temps, fallu pouvoir étrangler l’auteur, ou, du moins, lui fermer toutes les issues, assourdir autour de lui tous les échos, le retrancher enfin de la conversation des hommes.

Imperturbable et sans aigreur, il continua de s’agenouiller, au fond de son âme, devant l’ostensoir du Dieu vivant qu’il voyait toujours fulgurer, en ce crépuscule des âges, par dessus les cadavres asphyxiants de ses délétères adorateurs. Il écrivit où il put, dans des milieux indifférents ou hostiles à l’orthodoxie de sa pensée, assuré d’atteindre, malgré tout, les rares cerveaux à la débandade qui sont tout l’auditoire dont un artiste supérieur doit se contenter.

Il lança sur le monde quelques grands livres autour desquels s’amassèrent, avec une admira-