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Au fond, je ne crois pas que l’accusation formelle de renier sa patrie puisse beaucoup affliger un homme qui travailla si longtemps à l’abrutir. Mais on nous le montre en pleine invasion prussienne, livré à une sorte d’hystérie germanique dont le délire le fait trépigner comme un démoniaque en lui arrachant l’aveu de son exécration pour la France.

Et voilà précisément ce qui le révolte aujourd’hui. M. Renan s’est déclaré lui-même un homme « très-bien élevé » et sa prétention la plus chère est une irréprochable tenue. Il est certain que les révélations de M. de Goncourt accablent de ridicule ce pédant célèbre que sa philosophie de Lannion met à l’abri de tout déshonneur. Il est non moins incontestable que sa dignité de savantasse est compromise pour longtemps, pour toujours peut-être, car les livres de son adversaire survivront très-probablement aux siens. Encore une fois, c’est bien là ce qui le suffoque et dont sa joviale sagesse est impuissante à le consoler.

Il a beau écrire malhonnêtement que « le radotage des sots ne tire pas à conséquence et que l’avenir n’en croira rien », cet avenir dont il se croit le locataire emphytéotique, lui paraît, tout de même, inhabitable depuis la caricature dont l’a fielleusement décoré la malignité du vieux Goncourt.

Il sait que les anecdotes ont la vie dure et il a quelque chose comme le pressentiment que