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SOURCES ORIENTALES

peut se comparer à celui que ressentaient les lettrés de la cour des ducs de Ferrare ou des Médicis, alors que le goût artistique n’avait pas été émoussé par des siècles de décadence et que l’on savait encore admirer les plus beaux monuments qu’ait édifiés l’esprit des hommes.

L’Alighieri connut l’antiquité classique aussi bien que l'Arioste, peut-être même d’une façon plus complète encore,[1] et cependant il imita Virgile et les autres poètes latins avec beaucoup plus de discrétion. C’est un fait qui s’explique aisément.

On sent à la lecture de l’Orlando Furioso qu'en écrivant certains épisodes de son poème, l’Arioste avait continuellement l’Enéïde sous les yeux et qu’il la traduisait directement en italien ; chez Dante, nu contraire, les passages inspirés de Virgile ou des autres écrivains de l’antiquité ne sont le plus souvent que des réminiscences ; le poète toscan ne les a pas cherchées comme l’A-

  1. Par un passage de l’Inferno cité en note, page 188, on voit que Dante se vante évidemment sans aucune forfanterie d’avoir su l’Enéide par cœur (Inferno, xx.)