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l’épargne

elle arrive, ma foi, tant pis ! que les héritiers s’en tirent. Quelle bonne histoire ! un milliard, payable dans les vingt-quatre heures, avec dix millions d’encaisse !

Sous le gouvernement bourgeois de Louis-Philippe, les financiers, ravis d’abord de voir des prolétaires enrôlés par la rente dans l’armée de l’ordre, avaient battu des mains à l’invention des philanthropes. Mais, gens de calcul avant tout, ils ne tardèrent pas à prendre peur de cette invasion de la plèbe dans la dette publique et l’on ne songea plus qu’à l’entraver par la réduction du chiffre maximum des dépôts. Précaution vaine ! L’argent du petit monde continuait d’affluer dans la caisse, à l’effroi croissant du juste milieu. Cette dette flottante, montée jusqu’aux milliards, était passée à l’état d’épouvantail classique. M. Thiers, dès qu’il n’était plus ministre, enfourchait ce cheval de l’Apocalypse, pour secouer la terreur sur le troupeau bourgeois. Du haut de sa tête caracolante, il montrait du geste l’abîme d’où allait s’élancer le dragon de la banqueroute. Le portefeuille de retour, il mettait pied à terre et rentrait à l’écurie son noir coursier.

Ces temps naïfs sont loin. La dynastie napoléonienne nous à cuirassé l’épiderme, et personne ne s’inquiète ni de la caisse d’épargne, ni des bons du Trésor, cet autre facteur de la dette flottante, moyen ingénieux de manger son blé en herbe.