MISANTHROPIE
Mais ce n’est plus le temps ! je touche à mon midi ;
J’ai souffert, et dans moi mon esprit a grandi.
Ami, cache ta vie et répands ton esprit.
Non ! ce n’est plus le temps de chanter ses tristesses,
D’étaler aux regards son cœur agonisant ;
Il faut se relever fort contre les détresses,
Enfouir le passé, surmonter le présent.
Il faut garder son mal, abjurer ces faiblesses
Où l’âme avoue à tous son désespoir cuisant ;
Eh ! qu’importe à ce monde aux perfides caresses
Sous quel fardeau de peine on tombe en se brisant ?
Préservons notre foi de son contact impie :
Toi seule tu m’es chère, âpre misanthropie !
Avec toi je veux vivre, avec toi je mourrai.
Il faut aux cœurs blessés l’austère solitude ;
Là, nous retrouvons Dieu plein de sollicitude :
On ennoblit son âme en souffrant ignoré.